Le film Gasland

Voilà, nous avons regardé et écouté Gasland, film autobiographique qui se transforme en enquête sur la réalité quotidienne des gens qui habitent près des forages et des réservoirs de gaz de schiste aux États-Unis.

L’auteur, Josh Fox, est là pour faire voir et entendre les gens qui subissent l’horreur du gaz de schiste tous les jours de leur vie dans de très nombreuses régions des USA et pour défendre la région où il vit contre les installations d’exploitation de gaz de schiste.

Josh Fox, un Godard dans la nature sauvage

Le réalisateur, Josh Fox, est un intellectuel américain, metteur en scène de théâtre, qui vit dans une maison en bois construite juste avant sa naissance par ses parents et leurs amis hippies. Cette maison se trouve au bout d’un chemin de terre (et non pas «un chemin poussiéreux» comme le dit le sous-titre en français) dans un coin de nature sauvage de forêts, de lacs et de rivières, près du fleuve Delaware dont le bassin alimente entre autres les villes de New-York et de Philadelphie.

Ce film n’est pas le travail d’un journaliste d’investigation. C’est une œuvre personnelle, caméra au poing, inspirée par le cinéma de Godard. Josh Fox dit qu’il s’est souvent demandé comment à sa place, Godard filmerait telle scène ou comment il conduirait son récit.

Ventes de terres aux entreprises gazières

Aux États-Unis, le sous-sol appartient au propriétaire du terrain. Pour pouvoir exploiter le gaz de schiste, les entreprises gazières envoient donc une lettre à chaque propriétaire pour lui acheter des hectares en lui offrant une somme d’argent : 9400$ par hectare, ce qui est ridicule par rapport aux prix pratiqués dans notre coin des Cévennes pour 1500 m2 de terrain constructible pentu, tout sec, couvert de pierres, de ronces et d’épineux, et en plus schisteux, donc glissant et instable.

Josh Fox est un être délicat. S’il explique bien au début que ses voisins sont peut-être en train de vendre leurs terres, il ne fait aucune mention du fait que les propriétaires terriens qu’il rencontre par la suite peuvent être tenus pour responsables de la pollution due à l’exploitation du gaz de schiste qui les détruit à petit feu ou assez rapidement, selon les cas.

Chez nous, en France, c’est l’État qui livre le sous-sol qui lui appartient et on aurait pu imaginer que la décision ait fait l’objet d’un débat parlementaire.

Dans les deux pays, aucune information n’a été donnée aux gens. En France, tout s’est fait dans la plus grande discrétion, ce qui est très inquiétant. En général, le gouvernement se vante toujours, même de ses réalisations les plus infâmes, comme la chasse aux Roms et leur expulsion.

Les propriétaires américains qui ont vendu une partie de leur terre ne pouvaient pas imaginer les dégâts que causerait l’industrie gazière. Après le film Gasland, nous savons. Qu’allons-nous faire? Allons-nous croire que Total a une technique propre?

Le gouverment fédéral américain a aussi cédé des terres. Il existe en effet de grandes régions qui sont du domaine public où tout un chacun peut se promener et camper. Elles aussi sont envahies par les derricks, les réservoirs, les bassins d’évaporation, les colonnes de camions-citernes.

Enfin, Josh Fox nous apprend, dans un entretien accordé à Ownipolitics.com, qu’en Australie, le gouvernement exproprie les gens pour faire place à l’exploitation du charbon méthanier. Ce qui veut dire que les industries gazières sont prêtes à tout.

La pollution de l’exploitation du gaz de schiste

Dans le film, on finit par voir autre chose que des derricks et on finit par comprendre qu’ils ne sont qu’une étape. Il y a aussi des réservoirs, des gazoducs, des machines pour sécher le gaz mouillé qui sort des profondeurs, et tout cela fuit à qui mieux mieux. Des puits ont explosés et se sont enflammés. Il y a enfin d’énormes fosses dont le fond et les bords sont bâchés (pas du tout imperméables, comme nous l’a montré la petite enquête québécoise Gaz de schiste : sinistre perspective) qui servent de bassin d’évaporation des eaux ressorties des puits et polluées par le gaz et divers produits chimique , des machines pour vaporiser ces eaux au-dessus des bassins pour qu’elles s’évaporent plus rapidement au soleil.

Les gens qui habitent les cambrousses aux USA sont assez loin les uns des autres et ne bénéficient pas d’un réseau d’eau distribué par la mairie du coin. S’ils veulent de l’eau, c’est à eux de forer un puits.

Depuis l’installation des forages et des réservoirs de gaz de schiste, les puits qui alimentent les maisons en eau potable sont bourrés d’un mélange de boue, de produits chimiques et de gaz (inflammable, bien sûr). L’eau d’un puits ou d’une rivière produit des émanations de gaz, ça fait des bulles, ça s’allume au briquet, ou encore, il y flotte des flaques visqueuses, ou bien encore ça pue l’essence de térébenthine. L’air est souvent irrespirable et dans tous les cas, c’est un danger mortel pour la vie des gens et des animaux. L’eau potable auparavant des puits ou l’eau propre des rivières sont maintenant devenus des sujets d’expérimentation de chimiste.

Des gens ont des maux de tête constants, des vertiges, des douleurs affreuses, ils perdent l’odorat et le goût, certains marchent avec un déambulatoire, d’autres sont atteints de tumeurs au cerveau. Tous ces symptômes ont des causes connues, ce sont les effets des produits chimiques variées dont la liste est bien trop longue à réciter. Les gens et la scientifique témoigne de tout cela dans le film.

Dans certains cas, les entreprises gazières ont versé des compensations financières aux gens qui ont réussi à faire entendre leur cause (ce qui ne va pas de soi) mais contre le silence des gens indemnisés. En effet, il leur est interdit de parler à quiconque de la pollution et des dégâts dus à l’exploitation du gaz de schiste. Certains ont pourtant brisé le silence, vous les entendrez mais vous ne verrez que rarement leur visage car ils ont peur.

Eau potable

Dans certains cas, les entreprises remplacent l’eau polluée. Elles livrent alors régulièrement aux gens dont les puits sont devenus inutilisables et toxiques, des citernes de 2000 litres d’eau potable. Va pour 50 puits d’eau potable mais la question que pose Josh Fox, c’est comment on va remplacer l’eau des rivières.

Dans le film documentaire L’assaut final contre le bien commun, qui montre la main-mise sur le monde par des industriels de toutes sortes, il y a un type qui a la réponse. Il est prêt à exploiter l’énorme réserve d’eau d’un immense lac canadien réputée pour sa qualité. Selon lui, cette eau se perd, elle va dans la mer, pourquoi ne pas la vendre? Avec un pipe-line, il l’emmènera aux États-Unis.

C’est une vision d’ignare, évidemment. L’eau de ce lac n’est pas un produit de consommation, c’est une partie d’un tout. Par exemple, l’eau qui va dans la mer n’est pas un gâchis d’eau douce, car en se mélangeant à l’eau de mer, elle forme un environnement propice à la vie de tas d’organismes qui nourrissent des poissons et même des baleines.

C’est au début du film que vous regarder et télécharger: L’assaut final contre le bien commun.

Gazage lent

Gasland, poster

Gasland, poster

Il est impossible de soigner les gens parce que les effets de la pollution sont irréversibles et que l’environnement où vivent ces gens continue à être pollué. Tout le monde ne peut pas fuir, et à qui vendre sa maison ? et à la fin, on se demande en fait où se mettre à l’abri des ces entreprises qui sont telles des pieuvres.

Que peut-il arriver à ces gens? La déchéance et la mort, lentes et douloureuses. En attendant, l’industrie agro-alimentaire peut les nourrir de toute sa production infâme (OGM = herbicide à outrance), ça ne les tuera pas plus et ça rapporte gros. Encore un secteur qui peut profiter de l’industrie gazière.

Le titre de cette partie, «Gazage lent», est un écho à Gaz de schiste : colonisation et nazisme. Vous verrez, on y pense, au bout d’un moment, en regardant le film.
(Image de l’affiche du film Gasland, trouvée sur Flickr mis en ligne par yolaglloq qui n’a probablement aucun droit sur cette affiche).

Réponses aux critiques des industriels du gaz de schiste

Josh Fox a répondu point par point aux aux critiques que lui ont adressées les industriels du gaz de schiste. Document en anglais, au format PDF : “Affirming Gasland” (ce lien ouvre ou télécharge le fichier).


Sources :

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